En 1895, un chercheur allemand du nom de Wilhelm Roentgen découvre une source de rayons invisibles qui sont capables de traverser la matière. La nature exacte de ces rayons étant inconnue, il décide de les appeler « rayons X ».
Très rapidement, le monde entier se passionne pour ces étranges rayons auxquels on trouve nombre d’applications parfois utiles mais souvent farfelues. Dans ce domaine, la palme revient peut-être à l’utilisation de ces derniers à visée dépilatoire.
En 1896, un praticien Viennois du nom de Leopold Freund dirige une source de rayons X sur le une hypertrichose dorsale et décrit une chute complète de l’ensemble des poils dans les jours qui suivent.
La même année, aux USA, un médecin constata après avoir fait une radio de crâne à un patient qui avait une balle dans la tête que les cheveux tombent à l’endroit où sont dirigés les rayons.
En 1904, le Pr Sabouraud présente une étude sur 251 enfants atteints de teigne dans laquelle il irradie le cuir chevelu des enfants atteints afin de provoquer une alopécie passagère.
Il n’en fallait pas plus pour donner des idées à l’industrie cosmétique. L’épilation parfaite, sans douleur et parfois même définitive était née.
En 1908, Albert C. Geyser, un chercheur américain, invente un appareil qu’il dénomme le tube de Cornell capable, d’après lui de produire des rayons X sans irradier les zones adjacentes, instrument qu’il appliquera sur le menton de centaines de femmes afin de les dépiler de façon définitive.
Geyser utilisera son appareil pour traiter de nombreuses affections tel que le lupus ou l’eczéma, mais l’utilisera pour l’essentiel à visée dépilatoire et rebaptisera à cette occasion son tube de Cornell du nom plus commercial de Tricho System.
Le succès fut tel qu’en 1924, Geyser fonde la Tricho sales Corporation , une franchise qui rassemble tous les Tricho Institutes dans lesquels sont utilisées les Tricho machines.
Les résultats à court termes étant très satisfaisant, la méthode connaît un succès fulgurant dans la première moitié des années 20.
En 1926, un premier patient entame et gagne un procès contre la Tricho sales corporation pour l’apparition d’une fibrose cutanée disgracieuse. D’autres suivront. Et en 1929 l’American Medical Association condamne la société pour être à l’origine de lésions précancéreuses poussant la société à fermer en 1930.
Mais bien que la pratique fut reconnue dangereuse puis carrément interdite, de nombreuses femmes continueront d’y avoir recours de façon illégale.
Ainsi, dans son livre plucked : a history of hair removal, l’historienne R. M. Herzig raconte comment en 1940, la police de San Francisco perquisitionne la maison d’un docteur dans laquelle des femmes rentrent par la porte de devant et ressortent par la porte de derrière, convaincue d’y trouver un centre d’avortement caché… pour y trouver en réalité une clinique illégale d’épilation aux rayons X.
La pratique n’a vraiment et définitivement pris fin qu’après les explosions nucléaires de Nagasaki et Hiroshima et les choquantes images des terribles effets de la bombe nucléaire.
Aujourd’hui le centre de radiothérapie et de traitement des cancers de Versailles ne réalise pas d’épilation définitive.
Nous pratiquons en revanche
- la radiothérapie conformationnelle en 3D,
- la radiothérapie rotationnelle en modulation d’intensité guidée par l’imagerie embarquée
- et la radiothérapie stéréotaxique.
Sources
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- Sabouraud, Maladies du cuir chevelu – les maladies cryptogamiques – les teignes – éditions Masson 1910
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